Tout au long du mois de juin – Mois national de l’histoire autochtone – La Rotonde a invité l’artiste mohawk Barbara Kaneratonni Diabo à mener un projet de médiation culturelle avec un groupe diversifié de Québec et Wendake. Installé·e·s dans la Maison pour la danse pour une dizaine de rencontres, les participant·e·s volontaires prennent part à des échanges et à une création chorégraphique collective.
Dans le cadre de la Journée nationale des peuples autochtones, nous nous sommes entretenus avec Barbara Diabo, lauréate du Prix de la danse de Montréal 2021 (catégorie Interprète), pour dresser un portrait de cette créatrice inspirante.
Comment vis-tu le partage de tes racines et ta riche expérience en danse avec les participant·e·s du projet ?
Pour moi, ce projet est une telle opportunité de créer une meilleure compréhension et communication entre les cultures. C’est un lieu de rencontre où les gens se rencontrent, partagent et grandissent ensemble.
Les perspectives autochtones de la danse m’ont appris que la danse est bien plus que donner un « spectacle » – qu’elle peut être pour la guérison, la communauté, la Terre, les ancêtres, les générations futures et plus encore ! La danse peut être nourrissante pour tous et toutes !
Qu’est-ce que t’as apporté l’apprentissage des danses autochtones, considérant que tu n’as pas grandi dans la communauté Mohawk ?
La première fois que je suis allé à un pow-wow, quand j’avais environ 19 ans, ça m’a changé. Quand j’ai entendu ce tambour pour la première fois et que j’ai vu les danseurs et danseuses entrer, c’était comme si une force traversait mon cœur et j’ai réalisé que c’était une grande partie de moi qui manquait dans ma vie. À cette époque, j’ai également renoué avec ma communauté de Kahnawake et j’ai appris davantage sur la langue, les cérémonies, les perspectives, la musique et la danse. Pour moi, tout cela a apporté tellement plus de richesse à ma vie. Cela m’a apporté une communauté.
Tu pratiques entre autres la danse de cerceaux, veux-tu nous en dire davantage sur les origines et la symbolique de cette danse ?
La danse du cerceau est une danse de pow-wow avec plusieurs histoires d’origine. On m’a appris que le style que je fais est devenu connu grâce au danseur Tony White Cloud du peuple Jemez Pueblo. C’est une danse de contes où nous racontons des histoires en faisant des formes avec nos cerceaux, au lieu d’utiliser des mots. Il y a aussi un aspect de guérison à cette danse. Certains disent que le cerceau représente le cercle sans fin de la vie – il n’a ni début ni fin.
Selon toi, comment la danse peut-elle être un pont entre les communautés autochtones et allochtones ?
La danse est un puissant partage d’expériences. Pour moi, je danse quand les mots ne suffisent pas. La danse transcende le langage parlé dans une communication universelle des corps en mouvement. Mes expériences et mes perspectives peuvent rejoindre les expériences et les perspectives des autres à travers la danse. C’est un langage intellectuel, émotionnel et peut-être même spirituel qui peut jeter des ponts entre de nombreuses personnes.
Au-delà de la Journée nationale des peuples autochtones et Mois national de l’histoire autochtone, quelle(s) prise(s) de conscience ou passage(s) à l’action aimerais-tu voir arriver au pays?
Renseignez-vous le plus possible sur les peuples autochtones, leur histoire et leur vie actuelle. Soutenez les arts et les causes autochtones. Apprenez quelques-unes des langues autochtones. Écrivez au gouvernement au sujet des injustices qui doivent encore être réparées.
Nous avons été victimes de beaucoup de choses dans ce pays, mais n’oubliez pas que nous sommes tous un peuple beau, fort et résilient qui a une place importante dans le passé, le présent et l’avenir.
—
Pour rencontrer Barbara et découvrir la résultante de son projet avec La Rotonde, deux représentations gratuites auront lieu le jeudi 23 juin 2022 à 19 h et 20 h à la Maison pour la danse.
À propos de Barbara Diabo
Barbara Kaneratonni Diabo est Kanien’keha:ka (Mohawk) d’héritage mixte, originaire de Kahnawake. Elle habite maintenant Montréal, où elle est directrice artistique et chorégraphe pour A’nó:wara Dance Theatre.
Primée pour ses chorégraphies et interprétations depuis plus de 25 ans, elle crée afin de mettre en lumière les thèmes, récits et perspectives autochtones. Pour ce faire, elle combine les styles de danse des pow-wow, des Haudenosaunee et du contemporain afin d’invoquer une fusion artistique qui rejoint différents publics.
Barbara Diabo s’investit afin de partager sa culture. Pour ce faire, elle performe à travers le Canada et à l’international. Elle danse et crée pour les générations à venir, pour honorer, pour ses ancêtres, pour un sens de la communauté, pour celles et ceux qui ne peuvent pas danser, pour inspirer, pour communiquer, pour encourager la fierté culturelle et pour élever les esprits.
La présence de l’artiste sur le territoire de Québec est d’autant plus significative puisqu’elle a créé une pièce, Danseurs du ciel (Sky Dancers), sur l’impact de l’effondrement du Pont de Québec en 1907 durant lequel ont péri 33 ouvriers et travailleurs de la communauté Mohawk de Kahnawake. À travers cette œuvre, Barbara Kaneratonni Diabo souhaite raconter son histoire et celle du peuple mohawk vivant encore aujourd’hui les répercussions de ce drame.
Crédit photo : La Rotonde